Combien de fois entendons-nous parler d’équilibre? Combien de conseils recevez-vous tous les jours sur comment trouver l’équilibre? Et combien d’éloges donnons-nous aux mots comme: alimentation équilibrée et vie équilibrée? Tout ça pour dire que nous cherchons tous cet équilibre. Et loin de moi l’idée de vous dire d’arrêter de le faire. La quête de l’équilibre est tout à fait louable. Je suis plutôt d’accord pour trouver une sorte d’équilibre personnel, mais l’équilibre qui plane sur notre société et qui tombe sur les médias sociaux comme de la pluie, je ne l’ai toujours pas trouvé.
C’est cet équilibre que je voudrais dénoncer, malgré, j’en suis consciente, le peu d’influence que je peux avoir. Avant d’être mère, je n’ai pas trouvé cet équilibre et maintenant, avec bientôt deux enfants, je le trouve encore moins. Dans une journée de 24 heures, il n’y a pas suffisamment d’heures pour faire chaque chose sans rien négliger. En effet, le sport, ça demande temps et sacrifices. Le temps en famille (je vais dire 100% présent), ça demande temps et attention. Le travail demande temps et dépassement de soi, car nous aspirons à faire mieux et différemment. Alors, à mon avis, ce bel équilibre qui partage tous les morceaux à part égal, est un idéal presque inatteignable.
Une chose à la fois
Comme je le disais dans l’introduction, l’équilibre personnel trouvé selon nos styles de vie est plus réaliste (même si lui n’est pas facile à trouver ni à maintenir) que celui qu’on nous vend à coup de photos d’une vie parfaite suivie de pouces en l’air et de cœur. Dans la vie, on ne peut faire qu’une chose à la fois. Si je suis en train de faire une chose, je ne fais rien d’autre. Ça veut donc dire qu’on ne peut ni se diviser en deux ni diviser le temps contrairement au mythe que les femmes sont capables de faire plusieurs choses en même temps. Et pour faire une petite parenthèse, ce que la société essaye de passer pour une qualité chez la femme est plutôt une charge mentale avec laquelle ces dernières essayent toujours de jongler avec depuis des siècles. Je ferme la parenthèse.
Et donc, en partant de ce principe de faire une chose à la fois, il convient de dire qu’à la place de trouver l’équilibre, on passe notre vie à jongler avec des balles qui représentent différentes sphères de notre vie. On est loin de la définition de l’équilibre. On se concentre sur celle qui est dans les airs, même si les autres ne sont pas loin pour être lancées à leur tour. Parfois, on se trouve à en avoir deux dans les airs et sans possibilité d’en échapper une. Alors on prend sur nous, on jongle sans élégance, sans contrôle et sans certitude, mais on n’arrête pas de jongler pour autant. Et pendant ce temps, c’est presque un art et/ou une grâce de savoir quand interchanger les balles. En faisant tout notre «gros» possible comme personne, comme mère ou comme parent, à force de jongler, on devient alors jongleur. Voilà à quoi ressemble un équilibre personnel. À défaut de trouver l’équilibre que tout le monde cherche, j’embrasse volontairement cette définition loin d’être parfaite, mais au moins accessible.
La guerre des mères
Alors qu’on parle d’équilibre, je ne peux pas passer à côté de cette pression qu’on ressent dès qu’on tombe enceinte. Comme s’il y avait un rite de passage pour que les autres mères vous acceptent comme faisant partie du groupe. Même si la maternité nous rassemble toutes en tant que femmes, elle est également synonyme de compétition, de lutte et de frustration. Nous avons toutes nos propres idées sur ce qu’il y a de mieux pour nos familles. Pourtant, il n’est pas rare de vouloir être dans le même moule que ces mères qui semblent avoir trouvé le bon équilibre. Car une simple décision concernant la grossesse, l’accouchement, l’éducation des enfants, peut rapidement remettre en question vos choix, vos croyances et vos convictions.
Et n’essayez surtout pas de changer votre opinion pour rentrer dans la société secrète de camaraderie de ces autres mères qui savent tout sur tout. Car même en essayant très fort, vous aurez, de plus en plus, le sentiment d’être «nulles partout». En effet, la pression a le don de nous insécuriser au moment où plus que jamais comme mère nous avons besoin de nous faire confiance. À mon avis, le choix d’allaiter ou pas, d’utiliser les couches jetables ou lavables, de mettre votre bébé à la garderie ou de devenir mère au foyer, reste très personnel à chaque femme et à chaque couple parentale. Cette pression qui fait que ces sujets deviennent d’intérêt public aura comme conséquence de vous faire perdre même le peu d’équilibre que vous pensiez avoir. Alors en conclusion, dites-vous qu’on est le bon parent pour son enfant, en ce moment et qu’on fait tous notre gros possible!
Les standards
Qui n’a pas encore vu des photos circuler sur les réseaux sociaux des familles heureuses et épanouies qui s’amusent dans les vergers en cueillant des pommes, à la cabane à sucre ou encore pendant les activités d’hiver. Ce que ces photos ne montrent pas ce sont les levées matinales «chigneuses», les départs compliqués et parfois tout simplement catastrophiques pour aller passer ce doux temps de qualité en famille. Elles ne montrent pas non plus la peur des inconnus de notre plus jeune et l’excitation du plus vieux qu’on arrive à peine à contrôler.
C’est vrai que les activités en famille cassent la routine en plus de procurer beaucoup de plaisir et tout cela me plait. Ce que j’ai contre le bonheur et l’équilibre standardisés, c’est qu’ils nous font croire que l’harmonie est toujours au rdv et que certains ont reçu là où nous on galère. On n’a pas besoin d’aller aux pommes ni même faire de sortie de raquette en famille l’hiver pour être heureuse comme famille. On peut faire d’autres activités ou ne rien faire du tout lorsque cela ne s’apprête pas. Il faut rester soi-même malgré les standards proposés à coup de cliques et de mentions j’aime sur les réseaux sociaux. Ce sont des standards irréalistes comme ceux qui viennent avec cet idéal qui est l’équilibre dont on entend de plus en plus parler. Car l’équilibre c’est aussi savoir faire des choix pour soi. En effet, je ne suis pas toujours la mère que je voudrais être comme je n’étais pas la femme que je voulais être avant d’être mère. Je voudrais être partout, tout le temps et là pour tout le monde, mais au lieu de ça, je fais des choix pour essayer de concilier la famille, le sport, le travail, les études et d’autres rêves que je porte en moi. Oui, je préfère parler de conciliation que d’équilibre, car ce fameux soit disant équilibre donne des maux de tête à bien des mères et parents. On essaye de tout faire, ne rien manquer, ne rien échapper et vous en conviendrez que non seulement c’est du sport, mais c’est surtout impossible. Car des fois, pour ne pas dire souvent, la balle nous échappe ou encore une autre décide de partir dans les airs avant son tour.
Être soi-même
Comment faire la part égale de toutes nos responsabilités? Je crois qu’il faut juste s’assurer de faire suffisamment de la place à chacune de nos responsabilités selon le temps, l’énergie qu’on dispose. Le fait d’avoir cette flexibilité du temps qu’on dispose permet de composer avec les priorités de la journée sans culpabilité dans un monde comme le nôtre qui est fait de pas mal d’imprévus. L’équilibre propose de diviser notre temps en sorte que nous puissions arriver à tout faire dans notre journée. Or, en essayant de tout faire, on risque de ne rien faire à 100% ou encore pire, ne rien faire de concret. Le constant de ne pas arriver à tout faire pousse certains comme moi à passer volontairement plus de temps sur une chose de façon à le faire et en tirer des résultats au lieu de tirer aucun résultat dans la recherche d’équilibre.
C’est pourquoi c’est important de connaître ses priorités, car toutes les activités n’ont pas les mêmes valeurs, et tous les accomplissements ne s’équivalent pas. Faire tous les sports ne me serait pas utile que de me concentrer sur la course si c’est un défi en course à pied que je prépare. Faire le ménage n’a pas la même valeur que passer du temps en famille ou avec mon mari seulement. Répondre à mes courriels ou appels n’est pas au même niveau que terminer cet article. Loin de chercher l’équilibre, parfois, je me déséquilibre volontairement en passant plus de temps à jongler avec les balles qui sont importantes pour moi au lieu de s’encombrer avec l’ensemble.
Que ça soit la recherche d’équilibre ou la conciliation, n’oublions pas d’être nous-même. Trouvons ce qui fonctionne pour nous, et acceptons que certaines balles nous échappent et que malgré nos efforts, on n’a pas obtenu les résultats attendus. Comme il est impossible (totalement impossible) de tout faire, impossible de ne rien négliger et que lorsqu’on cherche à être partout on est nulle part, alors, choisissons d’accomplir une tâche à la fois, une seule sphère de notre vie à la fois. Il serait dommage que la recherche du parfait équilibre nous vole la joie des accomplissements réalisés juste parce qu’on reste focusé sur les balles dans nos mains et nos seuls dans les airs.
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