Une amie sur Facebook publie ceci: «Pour mes amis, sportifs, athlètes et triathlètes! On parle beaucoup de km, de pace, de nutrition, hydratation, repos …etc mais peu de préparation mentale». Sa publication m’a interpellé parce qu’elle a tout à fait raison, la préparation mentale on en parle peu. Du coup, je lui ai demandé si je pouvais m’inspirer de sa question pour en parler dans un article. Et voilà, nous y sommes!
Avoir un mental de fou, c’est possible? Comment ça se travaille? Y-a-t-il des personnes plus fortes mentalement que d’autres? Les moyens de préparer ce mental sont-ils semblables d’une personne à une autre? Autant de questions qu’on peut se poser. Dans cet article, je me penche surtout sur différents moyens de se préparer mentalement à une course officielle dite aussi chronométrée.
Au fur et à mesure que vous vous approchez de votre course, votre cœur, vos muscles et votre esprit doivent être conditionnés pour l’effort à venir. La préparation mentale passe par l’entraînement du corps et de l’esprit pour l’atteinte d’un objectif, en ce qui nous concerne pour courir et terminer une course officielle/chronométrée. Pour arriver à inclure cette préparation mentale à la préparation physique, des coureurs et coureuses s’y prennent de plusieurs façons, des façons originales les unes des autres. Je vous partage donc ma préparation mentale et celles des quelques autres coureurs et coureuses qui partagent leurs façons de faire avec générosité.
- Visualisation
Plusieurs d’entre nous utilisent cette technique ou cette façon de faire pour se préparer mentalement à une course officielle à venir. Selon cette définition que j’aime beaucoup que j’ai trouvé sur le site de Passeport Santé, «la visualisation est cette capacité mentale que nous avons de nous représenter un objet, un son, une situation, une émotion ou une sensation. Selon son intensité, cette représentation peut déclencher plus ou moins les mêmes effets physiologiques que le ferait la réalité». Par conséquent, s’imaginer notre course, notre parcours, la façon dont nous voulons commencer et finir, nous aide à apprivoiser le défi devant nous. Sachant que le défi peut prendre plusieurs formes comme une nouvelle distance, un dénivelé plus important, un retour à la course après une blessure ou un accouchement dans mon cas, tous ces éléments peuvent être sujet de visualisation.
Même si lorsqu’on entend visualisation, on pense visualisation positive, c’est à dire s’imaginer bien amorcer notre course et se voir à la ligne d’arrivée, la visualisation pour un coureur/une coureuse, ce n’est pas juste dans l’imaginaire, mais c’est aussi pratique. En plus de s’imaginer sa course, on peut aussi joindre à cette visualisation un plan de course. En général, le parcours est déjà balisé et c’est vrai qu’on peut juste «suivre sans réfléchir», mais s’imaginer chaque étape du parcours, en profiter pour planifier nos dropbag, je trouve que ça concrétise notre visualisation. Par ailleurs, même si ce n’est pas dans mes pratiques, plusieurs de mes amis vont sur le site même de la course officielle pour faire leur entraînement sur le même terrain que lors du jour J. D’autres vont étudier en détail les données disponibles sur la course comme la carte du parcours, le dénivelé, le niveau technique ainsi de suite. Cet entraînement ciblé et cette étude approfondie contribuent à la préparation mentale du coureur. De plus, certains comme moi vont prier aussi. Pour moi, c’est rassurant de mettre ma course, souvent un voyage aussi qui va avec entre les mains de Dieu. Je prie pour la protection, mais aussi d’avoir cette force mentale qui ne me quitte pas. De cette façon, une grande partie de ma peur disparaît parce que je sais que Dieu est plus grand que moi.
Dans tous les cas, malgré nos doutes et le défi que la course à venir représente pour nous, il est important de se visualiser en train de réussir notre course. Et la réussite ne signifie pas aucun imprévu le jour J ou encore aucune difficulté à aller au bout de la course. Non, la réussite dont je parle c’est de finir notre course peu importe les challenges qui nous attendent sur le parcours. Voyez-vous surpasser chaque obstacle avec humilité, mais avec force aussi.
- Le moment présent
Comme je vous l’ai dit au début de cet article, je me suis inspiré de réponses de coureurs et coureuses sur deux publications Facebook récentes. Pas mal tout le monde trouve important de se concentrer sur le moment présent, de se connecter avec la nature ou des éléments autour de nous. Une coureuse dit: «moi c’est admirer la nature tout en roulant et prendre des photos de mon coin et le SOURIRE est une source de miracle il me donne du boost hiiiiiiiiiii» Une autre dit: «moi c’est pas la vitesse qui compte c’est le plaisir de faire ce qu’on aime».
Oui, le moment présent lorsqu’on court donne du sens à nos entraînements, mais aussi à nos compétitions. On profite du voyage tellement que lorsqu’on arrive à la destination, on a qu’une seule envie c’est de recommencer. C’est pour cette raison que plusieurs choisissent de courir sans musique. D’autres au contraire d’avoir de la musique dans les oreilles pour se couper du bruit autour. Pour ma part, la nature m’aide à vivre ce moment présent. C’est la raison pour laquelle j’aime courir en trail plutôt que courir en ville. Les exemples sont nombreux pour courir dans le moment présent. Il y a le fait de laisser son téléphone cellulaire à la maison ou dans la voiture, laisser sa montre de course ou ne pas la regarder autant que nous le ferions en temps normal, ou encore choisir de courir seul qu’en groupe.
Courir dans le moment présent c’est aussi s’écouter, respecter son rythme, accepter de s’adapter et s’accompagner au lieu de se brutaliser. Même avec le meilleur plan de course, ça reste un outil et non une réalité le jour J. Ce jour-là, peu importe ce qui se passe par rapport à votre plan initial, regardez autour de vous et dîtes-vous que vous avez choisi d’être là, que vous êtes privilégié d’être là et peu importe l’issue de la course c’est là que votre dépassement va s’opérer. Une des coureuses nous a partagé ce proverbe: «vaut mieux arriver en retard qu’arriver en corbillard». Alors, prenez votre temps, vivez votre moment!
- Plaisir
Un coureur, je ne sais plus si c’est un homme ou une femme dit: «je m’entraîne maintenant que dans le plaisir, plus de pace, plus de temps, plus de course chrono, que du bonheur! Très motivant aussi». Oui, chaque chose à son temps et même lors de courses chronométrées, il est essentiel d’avoir du plaisir. J’ai adoré ma course d’ultra trail Canadian death race. J’avais décidé de bien profiter des Rocheuses canadiennes peu importe ma performance. Je comptais savourer chaque kilomètre même ceux difficiles. C’est exactement ce que j’ai fait. Pure plaisir et émerveillement pendant 125 km. J’étais très satisfaite d’avoir fini la course lorsqu’on m’a contacté pour me dire de revenir sur le site et recevoir ma médaille pour une deuxième place dans ma catégorie. Quoi, comment c’est possible? Je n’ai pas pensé à la performance une seconde. Je peux vous dire sans aucun doute que pour cette course le plaisir a été le moteur de ma performance. J’avais décidé d’avoir du fun et de vivre l’expérience de façon positive quoi qu’il arrive. Ce qui est arrivé dépassait tout ce que j’aurais pu imaginer en termes de résultat.
Lorsqu’on court des courses officielles, il est facile de se laisser emporter par la performance et la compétition qu’on oublie de profiter de la course elle-même. Le pace, le temps, tout cela ça compte en entrainement comme en compétition, mais le plaisir aussi est une force, un allié à l’atteinte de nos objectifs sportifs. Garder le plaisir dans notre pratique de la course à pied pour les entraînements, mais aussi pour les compétitions, est aussi important que le sommeil, l’alimentation, la musculation, l’étirement et bien d’autres choses, qui sont des éléments essentiels pour bien se développer comme coureurs/coureuses.
- Pourquoi?
«Et le plus important c’est d’avoir un why : pourquoi on fait ça». Oui, c’est tellement vrai! Pas juste pour la course à pied, pas juste pour une course officielle, pas juste pour des objectifs sportifs, mais dans tous projets et défis, vaut mieux garder pas très loin la raison pour laquelle on les fait. Le pourquoi nous centre et nous motive. Il nous centre parce qu’avoir une raison de faire quelque chose c’est aussi d’avoir de la profondeur, de l’assurance. On ne fait pas juste pour faire ou parce que quelqu’un d’autre fait. Et cette profondeur apporte force et confiance. Le pourquoi nous centre parce qu’il nous ramène à nous-même, à qui nous sommes en évitant de suivre une vague quelconque. Finalement le pourquoi nous distingue des autres. J’aime croire que nous sommes différents comme coureurs/coureuses parce que nous avons des raisons différentes. Et pour moi cette diversité fait la beauté de la course à pied, mais aussi de n’importe quel sport.
Que ça soit pour le plaisir ou pour l’aventure ou le dépassement de soi ou encore toutes ces réponses, ton pourquoi te permettra de poursuivre tes propres aventures et ta couleur comme personne viendra se mêler à celles des autres pour faire un arc en ciel.
- Verbaliser ton objectif
Ça c’est tout moi! Je parle de mes objectifs, je m’entraîne, je me visualise en train de commencer ma course et surtout de la finir, mais une chose que j’oublie souvent c’est de m’inscrire à la course en question. Deux fois, je me suis prise en retard pour m’inscrire à une course pour laquelle pourtant je m’entraîne déjà. Bref, tout ça pour vous dire que lorsque je me prépare pour une course, je suis tellement excitée (souvent, c’est sur ma liste de course à faire au moins une fois dans sa vie, alors…) que mon entourage va en entendre parler peut-être un peu trop.
Je me retrouve dans les propos de cette coureuse: «j’en parle bcp avec mes enfants et je me dit que je ne peux pas les décevoir alors ça me motive a continuer»! Je crois que parler de son objectif nous aide à nous préparer mentalement à le faire et à le réussir. Il devient vivant pour nous à force d’en parler, mais aussi ça mobilise une certaine responsabilité envers nous et envers les autres qui nous garde déterminés. Mais ici il faut faire attention. Il ne faut courir pour personne d’autre que toi. Les autres peuvent toutefois nous aider dans notre préparation mentale avec leur soutien et leurs encouragements.
Finalement, verbaliser son objectif nous aide à y croire. En effet, au début, tu peux te dire que tu es folle, que tu n’es pas à la hauteur de cet objectif, etc. Mais à force de le dire, à force de s’accrocher malgré le doute, au fur et à mesure des entraînements, l’objectif prend forme tant physiquement que mentalement. C’est un processus qui contribue au dépassement de soi et à la confiance en soi. Comme la visualisation, parler de notre course à venir joue un rôle important dans la préparation jusqu’à la ligne d’arrivée.
- Normaliser le stress et la peur
«C’est naturel, c’est physiologique» dit un autre coureur. Il a raison! Un peu comme le stress avant une entrevue, avant un premier rdv amoureux, celui avant une course est tout à fait normal. Encore heureux d’ailleurs. C’est rassurant de savoir que notre corps est conscient de l’effort qui l’attend et qu’il s’y prépare. Quant à la peur, elle n’est pas mauvaise non plus. La peur de l’inconnu est tout à fait normale. Le corps conscient de la grandeur du défi qu’on s’est donné va produire toutes sortes d’émotions. J’imagine même que c’est pour nous persuader de ne pas franchir le pas. Rappelez-vous que son objectif c’est de nous protéger. Maintenant qu’on sait que notre corps fonctionne très bien grâce à ces signaux essentiels à la survie, c’est à nous de le rassurer. Le danger n’est pas réel. En réalité, le corps est bien préparé pour ce défi sportif et il est prêt à y faire face.
Après avoir rassuré le corps, c’est à notre tour de nous rassurer. Une autre coureuse nous donne ce sage conseil: «accepter de vivre des émotions fortes bonnes et moins bonnes». Les courses officielles sont remplies d’émotions fortes. C’est d’ailleurs une des raisons pourquoi j’aime en faire. C’est impossible de séparer la course de ces émotions. Impossible aussi d’avoir que des émotions positives. Dans votre expérience, il y aura de tout. Mais au final, vous serez fière de ce tout sans exception. La bonne préparation mentale de nos pensées passe, entre autres, par le fait de donner de la place à ce tout d’émotions.
- Trouver des solutions si possible
Oui, ne nous laissons surtout pas aller dans des mauvaises pensées qui amènent au découragement. Et au-delà d’avoir des pensées positives, il faut «nommer tous les éléments stressants et trouver des solutions si possible» dit un autre coureur. Des exemples des stresseurs sont nombreux. Voici quelques uns et leurs solutions:
- Manque de lumière la nuit
Solution: Batterie de rechange pour la lampe frontale
- Avoir froid
Solution: Prévoir des vêtements de rechange sur le parcours.
- Distance trop longue
Solution: Fractionner la course en plusieurs parties en faisant par exemple 10 km à la fois ou en se donnant comme objectif le prochain ravitaillement.
- Peur d’indigestion
Solution: Diversifier votre alimentation en aliments salés et sucrés et prévoir des textures différentes et des niveaux d’absorption différents.
Le jour J
«On ne se sent jamais prêt, mais on est souvent plus que prêts» nous rappelle une coureuse. Alors ne nous fions pas à notre impression. Lorsque nous avons envie de nous trouver des excuses pour arrêter sachant que notre entourage va être fière de nous malgré tout, n’allons pas là. Oui, nous en avons surtout marre et ça se comprend, mais dans ces moments-là il est plus constructif de trouver une personne ou une raison de nous pousser encore plus vers notre objectif initial, celui de terminer notre course. Quelqu’un m’avait dit à mon premier ultra marathon de 65km d’Harricana de faire continuellement le point sur mon état de santé pour séparer mon impression de mon vrai état. Est-ce que j’ai mal aux muscles? Oui. Est-ce que je peux continuer? Oui, je n’ai pas de claquage musculaire ou autres choses donc, c’est bon. Est-ce que j’ai mal au cœur? Non, mon coeur va bien, il ne s’emballe pas, je peux continuer. Est-ce que j’ai mal aux articulations? Non. Ainsi de suite… Et si notre état général nous dit qu’on peut continuer, alors on poursuit notre route en se parlant pour se remonter le moral. C’est ici que tout ce que nous avons fait pour nous préparer mentalement à ce défi devant nous nous sert de colonne vertébrale. On se visualise franchissant la ligne d’arrivée avec des applaudissements des autres coureurs/coureuses et membres de famille; on lève la tête et on regarde autour de nous pour ne rien oublier de cette aventure; on oublie pas le sourire car on est privilégié d’être là; et autant que nécessaire, on garde le focus sur le pourquoi!
Bonne course!!!
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